Stress et activité physique ne font pas bon ménage chez les étudiants

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Une enquête du Service d’Information Promotion Education Santé- ULB.

Il est maintenant bien démontré qu’une activité physique régulière contribue à la santé des personnes et devrait être, autant que possible, intégrée dans le quotidien de chacun. En effet, pratiquer régulièrement une activité physique est associée à un meilleur état de santé et de bien-être, et cela à tous les âges de la vie 1. Pourtant, dès l’adolescence la pratique de l’activité physique diminue, et, cette diminution est encore aussi importante lors du passage à l’université 2.

Le début des études supérieures est une période de changements important dans la vie des jeunes adultes : indépendance vis-à-vis des parents qui s’affirme, départ du foyer familial pour certains, nouvelles responsabilités financières, nouvelles méthodes d’apprentissage (cours, examen), etc. Si cette transition comporte des découvertes et des accomplissements, alors cela peut également être une source de stress chez les étudiants. Ils ne trouvent dès lors pas forcément le temps, les moyens ou l’envie de pratiquer une activité physique régulière.

Or, d’après la littérature scientifique, il existe une relation probante entre le niveau d’activité physique et le stress chez les étudiants. Cette relation serait bidirectionnelle : 1) les étudiants les plus actifs ont tendance à être les moins stressés, et 2) les étudiants les moins stressés ont tendance à être plus actifs 3 4. D’une part, le fait de pratiquer une activité physique modérée à intense permettrait, entre autres, de réduire les marqueurs inflammatoires associés au stress comme le cortisol, et de stimuler la production d’endorphines menant à une sensation de bien-être émotionnel 5 . D’autre part, le fait d’être stressé est un frein à la pratique d’une activité physique régulière 6.

Quelles sont les recommandations actuelles en matière d’activité physique pour les adultes ?

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande une pratique régulière de l’activité physique et de limiter les temps sédentaires7. Les recommandations concernant l’activité physique pour les adultes sont :

• Au moins 150 à 300 minutes d’activité physique d’intensité modérée par semaine
ou
• Au moins 75 à 150 minutes d’activité physique d’intensité soutenue par semaine
et
• Des activités de renforcement musculaire d’intensité modérée à soutenue au moins deux fois par semaine.

En Belgique en 2018, moins de 50% des jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans pratiquaient au moins 150 minutes d’activité physique d’intensité modérée 8. A cause de la pandémie de Covid-19, ces niveaux d’activité physique auraient diminué, alors que les niveaux de stress auraient augmenté, parmi les étudiants 9 comme en population générale 10 11. Au printemps 2021, environ 7 étudiants sur 10 de l’ULB et de l’UCLouvain déclaraient être « beaucoup » ou « fortement » stressés 12.

Par contre, il existe actuellement peu d’informations sur les effets à moyen terme de cette crise, sur le stress, et ses conséquences éventuelles sur la pratique de l’activité physique des étudiants. C’est pourquoi, l’objectif de cette étude était d’analyser dans quelle mesure la pratique d’une activité physique favorable à la santé variait selon les niveaux de stress des étudiants à l’ULB en 2022.

Les données présentées ci-après sont celles de 1 754 étudiants de l’ULB ayant participé, au printemps 2022, à l’enquête sur l’alimentation et l’activité physique, menée en collaboration avec l’Observatoire de la Vie Étudiante (OVE). Les données ont été récoltées par un questionnaire en ligne en utilisant des outils de mesure du stress et de l’activité physique dont la validité et la fiabilité ont été démontrées auprès de la population étudiante 13 14.

En 2022, la pratique d’activité physique est insuffisante et les niveaux de stress sont élevés chez les étudiants

Dans cette étude, plus de la moitié de l’échantillon étaient des femmes (59,3 %). Environ un tiers des répondants (35,3 %) avait un niveau d’activité physique favorable à la santé, ce qui est inférieur à ce qui était observé chez les jeunes adultes en population générale (étudiants ou non) en 2018 en Belgique 15.

Aussi, plus d’un quart des étudiants déclaraient, en 2022, être « beaucoup » (26,6 %) ou « fortement » (26,2 %) stressés. Ces résultats étaient inférieurs à ceux rapportés en 2021 à la même période de l’année chez les étudiants de l’ULB, avec, au total, environ 50% des étudiants concernés en 2022, contre 7 sur 10 en 2021. Ce constat pourrait être, entre autres, lié à l’assouplissement des règles sanitaires en vigueur au printemps 2022. Bien que nous n’ayons pas de données sur les niveaux de stress chez les étudiants à l’ULB avant à la crise sanitaire, plusieurs études indiquent un niveau de stress plus faible avant la pandémie de Covid-19 16.

Les étudiants les moins stressés sont les plus actifs

Globalement, au plus les étudiants avaient un niveau de stress élevé, au moins ils avaient un niveau d’activité physique favorable à la santé (Figure 1).

Après ajustement pour les caractéristiques sociodémographiques, ceux n’étant « pas du tout » à « moyennement » stressés étaient plus enclins à avoir un niveau d’activité physique favorable à la santé comparés à ceux déclarant être « fortement » stressés. Par contre, ceux ayant déclaré être « beaucoup » stressés étaient susceptibles d’avoir un niveau d’activité physique favorable à la santé de façon comparable à ceux étant « fortement » stressés.

Cette relation entre le stress et l’activité physique favorable à la santé était en fait retrouvée chez les hommes mais pas chez les femmes (Figure 2). En effet, chez les hommes, la proportion d’étudiants ayant une pratique d’activité physique favorable à la santé était la plus élevée parmi ceux ayant déclaré être « pas du tout, un peu ou moyennement » stressés, et la plus faible chez ceux étant « fortement » stressés. Chez les étudiantes, la pratique d’une activité physique favorable à la santé était similaire quel que soit le niveau de stress (Figure 2).

Notons aussi, que la proportion d’étudiantes pratiquant une activité physique favorable à la santé était globalement beaucoup plus faible que celle des étudiants masculins : les hommes (48,5 %) étaient environ deux fois plus nombreux à avoir un niveau d’activité physique favorable à la santé que les femmes (26,1 %).

Des particularités aussi selon le niveau d’étude

Les étudiants en 1ère année de bachelier (39,1%) et en 2e-3e années de bachelier (38,8%) étaient nombreux à atteindre un niveau d’activité physique favorable à la santé comparés aux étudiants en master (31,3%).

Les tendances décrites dans la Figure 1 étaient également observées chez les étudiants en bachelier et en master, mais de façon plus importante chez les étudiants en 2e et 3e années de bachelier (Figure 3). Chez les étudiants en 1ère année de bachelier et en master, bien que ces tendances se dessinent graphiquement, l’association entre l’activité physique et le stress n’était pas statistiquement significative. Ceci est notamment dû à une perte de puissance statistique liée aux faibles effectifs obtenus lorsque l’échantillon est divisé en sous-groupes.

Pour conclure et aller plus loin…

Cette enquête est transversale, c’est-à-dire que les données d’activité physique et de stress ont été récoltées à une même période (printemps 2022). Il n’est donc pas possible de déterminer de lien de cause à effet. La présentation de ces différences reste cependant informative car comme évoqué précédemment, la relation entre activité physique et stress est bidirectionnelle 17. D’une part, l’activité physique peut agir sur le stress en permettant de réduire et de mieux faire face à ses symptômes, et d’autre part, ressentir du stress est un frein majeur à la pratique d’activité physique. En effet, le stress engendrerait une perte de motivation et de confiance en soi, leviers pourtant importants pour la pratique d’une activité physique régulière. Et ce, alors que les étudiants font face à de nombreux autres freins pour pratiquer une activité physique suffisante, notamment contextuels (accès aux infrastructures, sécurité, temps à consacrer aux études, coût…), psychosociaux (soutien familial, support social…) ou autres (connaissance de l’offre, blessures…) 18.

Globalement, d’après cette enquête, les niveaux d’activité physique des étudiants à ULB étaient assez faibles, tandis que les niveaux de stress restaient importants, même après la levée des mesures contre la pandémie de Covid-19. Ces résultats mettent en évidence la nécessité de développer des actions de promotion de la santé ciblées vers les étudiants à l’université. Ils permettent également d’informer les acteurs de promotion de la santé sur les enjeux liés à l’association entre l’activité physique et le stress. Vu les bienfaits d’une activité physique suffisante pour la santé, tant physique que mentale, il est plus important que jamais de continuer à la promouvoir, en particulier aux périodes de la vie très stressantes, comme lors des études supérieures.

Notes et références

  1. Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Activité physique. Disponible sur : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/physical-activity ↩︎
  2. Kwan my, Cairney J, Faulkner GE, Pullenayegum EE. Physical activity and other health-risk behaviors during the transition into early adulthood: a longitudinal cohort study. Am J Prev Med. 2012; 42:14-20. ↩︎
  3. Schultchen D, Reichenberger J, Mittl T, Weh TRM, Smyth JM, Blechert J, Pollatos O. Bidirectional relationship of stress and affect with physical activity and healthy eating. Br J Health Psychol. 2019; 24:315-333. ↩︎
  4. Wunsch K, Fiedler J, Bachert P, Woll A. The Tridirectional Relationship among Physical Activity, Stress, and Academic Performance in University Students: A Systematic Review and Meta-Analysis. Int J Environ Res Public Health. 2021; 16:1-18. ↩︎
  5. Muradyan A, Macheiner T, Mardiyan M, Sekoyan E, Sargsyan K. The Evaluation of Biomarkers of Physical Activity on Stress Resistance and Wellness. Appl Psychophysiol Biofeedback. 2022; 47:121-129. ↩︎
  6. Cf. 3 ↩︎
  7. Bull FC, Al-Ansari SS, Biddle S, et al. World Health Organization 2020 guidelines on physical activity and sedentary behaviour. Br J Sports Med. 2020;54:1451-62. ↩︎
  8. Drieskens S, Nguyen D, Gisle L. Pratique d’activités physiques. Enquête de santé 2018. Sciensano. 2019: 101 pages. Disponible sur : https://www.sciensano.be/fr/biblio/enquete-de-sante-2018-pratique-dactivites-physiques ↩︎
  9. Podstrawski R, Finn KJ, Boryslawski K, Omelan AA, Podstawska AM, Skrzypczak AR, Pomianowski A. The Influence of COVID-19 on University Students’ Well-Being, Physical Activity, Body Composition, and Strength Endurance. Int J Environ Res Public Health. 2022; 25:1-14. ↩︎
  10. Drieskens S, Berger N, Vandervijvere S, Gisle L, Braekman E, Charafeddine R, De Ridder K, Demarest S. Short-term impact of the COVID-19 confinement measures on health behaviours and weight gain among adults in Belgium. Arch Public Health. 2021; 79: 1-10. ↩︎
  11. Sciensano. Septième enquête de santé COVID-19 – Résultats. 2021: 42 pages. Disponible sur : https://www.sciensano.be/fr/biblio/septieme-enquete-de-sante-covid-19-resultats-preliminaires ↩︎
  12. Observatoire de la Vie Etudiante ULB, Observatoire de la vie Etudiante UCLouvain. Portrait de la santé mentale et du bien-être des étudiant·es universitaires en 2021. 2022. Disponible sur : https://uclouvain.be/fr/etudier/resultats-enquete-sante-mentale-bien-etre-etudiants.html ↩︎
  13. Elo A-L, Leppänen A, Jahkola A. Validity of a single-item measure of stress symtoms. Scand J Work Environ Health. 2003; 29:444-451. ↩︎
  14. Lee PH, Macfarlane DJ, Lam TH, Stewart SM. Validity of the International Physical Activity Questionnaire Short Form (IPAQ-SF): a systematic review. Int J Behav Nutr Phys Act. 2011; 21:1-11. ↩︎
  15. Cf 8 ↩︎
  16. Benham G. Stress and sleep in college students prior to and during the COVID-19 pandemic. Stress Health. 2021; 37:504-515. ↩︎
  17. Cf. 3 ↩︎
  18. Ferreira Silva RM, Rodrigues Mendonça C, Diniz Azevedo V, Raoof Memon A, Silva Noll PR, Noll M. Barriers to high school and university students’ physical activity: A systematic review. PLoS One. 2022; 17: 1-24. ↩︎
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